Tezio Corteze
Инженер мечты
Des Articles
La demande portait sur un article pour l’anniversaire du lancement de la première station orbitale Saliout 1. Je souhaitais raconter le contexte et surtout l’héritage des stations militaires Almaz de Chelomei et parler de l’anecdote de la poupée dédicacée par l’équipage avant le décollage. Il est vrai que les dédicaces de l’équipage complet de Soyouz 11 disparu à l’issue du vol sont rares. Mais surtout, l’idée de pouvoir redessiner la station fut la motivation principale car en faire un poster me plaisait beaucoup. Voir Dessins et pixels.
Saliout 1 - la première station
Espace et Magazine n°29 – Mai/Juin 2007
Un peu d’histoire
Au début des années 60 Korolev développa un projet de base spatiale à modules multiples qui nécessitait l’utilisation d’une fusée puissante (la N1) dont la mise au point allait demander encore des années.
Dés 1962, Chelomei, le concurrent de Korolev proposa aux militaires de les doter d’une plate-forme de surveillance habitée. Il la nomma Diamant - ALMAZ en russe. Cette plate-forme était composée d’une station, véritable habitation orbitale : l’OPS, et d’un véhicule de ravitaillement et de transport : le TKS.
Chaque composant ayant quasiment les mêmes caractéristiques : 20 tonnes et 4,15 m de diamètre. Ce projet n’imposait pas de nouveau lanceur car Chelomei repris les caractéristiques de celui qu’il venait de mettre au point : l’ UR – 500 ou Proton.
Fin 1969, dans la période troublée par l’échec du projet de débarquement lunaire et les luttes d’influences politiques qui régnaient entre les différents constructeurs, un petit groupe d’ingénieurs du TsKBM de Chelomei rencontra le successeur de Korolev. Là, devant Michine et Chertok, ils proposèrent les bases d’une collaboration avec comme objectif de lancer la première station orbitale deux ans avant le Skylab américain.
Le 9 février 1970, le Gouvernement entérine le projet sous le nom de DOS-17K (Dolgovrenaya Orbitalnaya Stantsiya) et fait transférer chez Michine les 8 modèles d’essais et le 2 modèles de vol sur lesquels travaillait Chelomei depuis 5 années. Malgré les fortes réticences de Michine, de cette idée naquit toute la filière des stations Saliout : Les stations militaires où la configuration générale de l’OPS d’Almaz fut conservée mais adaptée pour recevoir à l’arrière le Soyouz. (Saliout 2, 3 et 5)
Les stations civiles où l’OPS d’Almaz fut entièrement réaménagé, équipé d’un sas à l’avant pour la jonction avec Soyouz (puis plus tard d’un autre sas à l’arrière) et doté de grands panneaux solaires fixés sur le corps central. (Saliout 1, 4, 6 et 7 puis Mir)
ZARIA ou SALIOUT 1
Pour Saliout 1, le travail commence en décembre 1969 sous les auspices de l’Académie des sciences. Chelomei fut donc contraint de livrer ses OMS débarrassés des équipements militaires à un Michine réticent.
2 ans plus tard, le 1er février 1971, la première station est transportée à Baïkonour. Youri Semenov assure simultanément sur place les tests sur 2 stations (futures Saliout 1 et 2).
La première est baptisée Aube – ZARIA en russe et son nom est peint sur les flancs du corps central. Juste avant son lancement, le 14 avril, son nom est changé en SALIOUT 1, car les soviétiques ne veulent pas créer de confusions avec le nom du vaisseau que préparent les chinois. Saliout 1 décolle lundi 19 avril 1971 avec son ancien nom, Zaria* peint sur ses flancs et il faudra attendre 20 ans pour voir les images du lanceur et la station ainsi affublée.
*Le 20 novembre 1998, un module au nom de Zaria décollera à son tour avec une fusée Proton depuis Baïkonour pour constituer le premier élément de la Station Spatial Internationale.
8 jours seulement après la mise en orbite, les soviétiques diffusent les premières photos de Saliout 1 dans son hall d’assemblage à Baïkonour (vues de la partie supérieure et ventrale). La taille surprend. Saliout 1 est un gros cigare qui ressemble à une série de cylindres emboîtés (2 m, 2,9 m, 4, 15 m et 2,2 m de diamètre). Les chiffres annoncés sont également surprenants : 18 425 kg pour prés de 83 m3 habitables, 100 moteurs électriques, 2000 appareils, 1 200 kg d’appareils scientifiques et plusieurs centaines de kilomètres de câbles électriques !
Avec le recul, ces données générales nous semblent familières rappelant toutes les stations qui vont suivre comme MIR.
Les WC : au fond à droite !
A l’avant de Saliout 1, le premier compartiment sur lequel le Soyouz vient s’amarrer prend le nom de compartiment de passage. Ce compartiment de 3 mètre de long pour un diamètre de 2 m est la première adaptation des OPS de Chelomei. Le nouveau système de jonction fait son apparition. Après avoir assuré la jonction entre les deux vaisseaux et enclenché les connections périphériques, il peut être escamoté et permettre ainsi le passage des équipages. A quelques détails prés, ce mécanisme est encore utilisé de nos jours.
Dans ce compartiment de passage de 8 m3 sont logés une partie de l’appareillage astrophysique, le système de thermorégulation et de survie ainsi que plusieurs panneaux de commande.
A l’extérieur, on découvre deux panneaux solaires empruntés au Soyouz, les antennes de rendez-vous (omnidirectionnelle de poursuite à grande distance et celles du système d’approche), la camera TV, le télescope Orion ainsi que des ballons d’air comprimé.
De l’intérieur, nous constatons que ce compartiment de passage est cloisonné. Une écoutille est aménagée donnant accès vers le compartiment de travail. Plus tard, lorsque les grands panneaux solaires seront été implantés sur le corps central des futures stations (4, 6 et 7), la place libérée par les panneaux de Saliout 1 permettra de loger le sas de sortie pour les EVA.
Le compartiment de travail. D’une longueur totale de prés de 9 mètres, une première zone d’un diamètre de 2,9 m et 3,8 m de long se prolonge d’une partie tronconique d’1,2 m de long qui ouvre sur la plus grande partie de la station longue de 4,1 m pour un diamètre de 4,15 m.
Passé l’écoutille, nous débouchons sur une plate-forme qui supporte le tableau de bord auquel fait face deux fauteuils. Tenant compte de l’urgence à préparer la station, les constructeurs ont pris le parti de reprendre le tableau de bord du Soyouz comme pupitre central de pilotage. Placé sur la gauche du tableau de commande de Saliout 1, la partie droite est occupée par un tableau contrôlant les systèmes de survie, l’appareillage scientifique et supportant les commandes du calculateur de bord. De part et d’autre, les cosmonautes disposent de deux autres blocs de contrôle de survie et de signalisation.
Sous ce pupitre central, visant la Terre, on trouve le viseur à grand et petit angulaire permettant l’orientation de la station. Au-dessus du poste de pilotage se trouve le poste de travail n°2 permettant l’orientation et l’astronavigation de la station.
Entre les deux fauteuils qui font face au pupitre central et un peu en retrait, a été placé le coin repas avec sa table faisant office de couvercle donnant accès aux couverts, plats et réchauffeurs. A l’arrière du bloc repas est fixé un réservoir d’eau potable remplaçable d’où sortent trois tuyaux équipés de compteurs pour le suivi de la consommation individuelle.
Passé le poste de pilotage et le coin repas nous entrons dans le cœur du compartiment de travail. Pour la première fois, les concepteurs (architectes, psychologues et ingénieurs) ont pu offrir aux cosmonautes des conditions de travail et de séjour agréables.
L’espace intérieur est agencé comme sur Terre avec un plancher, des murs recouverts de tissus et d’un plafond. Toutes ces surfaces de couleurs claires sont en fait des placards numérotés qui abritent les appareils scientifiques, la documentation de bord, la pharmacie, etc… Plusieurs niches abritent différents postes de travail. 22 orifices, dont 8 hublots sont occupés par des appareils scientifiques et autre caméras sont disposés principalement dans le plancher et le plafond de la station.
En reprenant notre visite depuis le coin repas, nous découvrons le poste médical équipé d’un fauteuil de même structure légère que ceux du poste de pilotage. Au centre de la grande section de la station, entre le plafond et le plancher, prend place une grande colonne tronconique qui abrite les instruments scientifiques du télescope OST-1 de l’observatoire de Crimée (poste n°3). Les capteurs de ce télescope débouchent à l’extérieur sous le ventre de Saliout. Autour de cette grosse colonne, prennent place de nouveau équipements que nous n’avions pas l’habitude de trouver sur les vols spatiaux : le tapis d’exercices où les cosmonautes peuvent courir sanglés depuis le sol, les réfrigérateurs pour conserver la nourriture pour un mois et le coin sanitaire installé tout au fond de la station.
De grandes poignées sont implantées sur toutes les parois ainsi que de multiples points de fixation pour les pieds prés des postes de travail. Pour la première fois, les notions d’entretien et de réparation ont été prises en compte. Une caisse à outils fait maintenant parti du matériel de bord.
Le dernier module de la station n’est pas pressurisé et constitue la seconde adaptation apportés aux OPS. C’est un cylindre de 2,2 m de diamètre, long de 2,17 m qui abrite les réservoirs et le bloc moteur de la station. C’est la salle des machines. Là aussi les soviétiques ont fait appel aux moteurs du Soyouz en plaçant le bloc moteur principal et secondaire du vaisseau de Korolev. Il le dote d’une réserve de 2 tonnes de combustible et un ensemble de petits blocs moteurs assurent le contrôle d’attitude de la station. Comme à l’avant, deux panneaux solaires issus des lignes d’assemblage du Soyouz prennent place de chaque coté du compartiment moteur portant à 28 m2 la surface totale de photopiles pour la station. Ils délivrent 2kW sous une tension de 27 v.
Les équipages
Trois équipages sont entraînés pour le séjour dans Saliout 1.
L’équipage principal : Eliseyev et Roukavichnikov sous les ordres de Chatalov.
L’équipage n° 2 : Koubasov et Kolodin sous les ordres de Leonov.
Et l’équipage n° 3 : Volkov et Patsayev sous le commandement de Dobrovolsky
Du 9 au 15 mars 1971, les trois équipages s’entraînent alternativement sur les simulateurs de la Cité des étoiles. La station, le Soyouz et les équipages sont déclarés prêts pour la mission le 17 mars et le 19, la Commission d’état autorise la mission.
Le 25, les grandes lignes de la mission sont précisées au Kremlin. Le lancement de la station est envisagé entre le 15 et le 20 avril. Trois jours plus tard le premier équipage y prendra place pour une durée d’une trentaine de jours. 25 jours après leur retour le second équipage le remplacera dans la station pour 30 à 45 jours.
Le 6 avril, Les trois équipages partent pour Baïkonour où ils sont isolés dans l’Hôtel des cosmonautes. Le lendemain, les trois commandants découvrent leur future maison de l’espace dans le hall de préparation finale. Le 15, la Proton surmontée de la station est érigée sur le pas de tir après son transport horizontal.
Le 19 avril 1971, sous les yeux des cosmonautes et de la commission d’état, Saliout 1 prend la route de l’espace à 6 h 40 locale sous une fine pluie. La station se place sur l’orbite nominale, mais l’un des capots de protection d’équipements scientifiques ne se détache pas. Certaines expériences ne pourront être accomplies.
Soyouz 10 avec l’équipage n°1 prend la route de l’espace le 23 avril. L’approche automatique guide le vaisseau à 180 mètre de la station. La jonction est effectuée manuellement, mais pas dans le bon angle d’approche faute d’instrument pour contrôler cet angle. Concrètement, la perche du Soyouz se connecte bien dans le cône à l’avant de Saliout, mais la véritable jonction périphérique qui doit s’enclencher avec une certaine force est impossible. Chatalov constate qu’aucun voyant n’atteste l’assemblage et qu’aucune liaison entre le vaisseau et la station n’est établi. L’équipage n’a pas de scaphandre pour aller constater sur place. Pour cette mission, Michine à fait ce choix qui va s’avérer crucial. « Je ne veux pas de trouillards à bord de mes vaisseaux ! ».
Après avoir essayé une seconde jonction et plusieurs tentatives de forcer le système de jonction, Soyouz 10 reste ainsi, accroché à Saliout 1 pendant 5h 30. Un retour d’urgence est programmé. Le retour se fait pour la première fois de nuit après un vol de moins de 25 heures.
L’analyse des images et des films de Soyouz 10 ne montre rien de particulier. Le cône de jonction semble intact laissant la possibilité d’une seconde mission : Soyouz 11.
Après analyse, il s’avéra nécessaire de renforcer la perche de jonction du Soyouz qui s’était probablement déformé lors de la jonction tentée dans un mauvais angle.
Soyouz 10 emportait dans son compartiment orbital les cassettes destinées au télescope OST-1. Elle furent détruites avec le compartiment orbital et les casettes de remplacement ne purent être prêtes pour Soyouz 11.
SOYOUZ 11
Le 21 mai 1971, les deux équipages assignés découvrent le mécanisme de jonction renforcé qui alourdit le vaisseau d’une dizaine de kilos. Une semaine plus tard, par avions séparés, les équipages retournent à Baïkonour. Le 1er juin, le vaisseau Soyouz 1 est fermé prêt pour le vol.
Le 3 juin, les deux équipages passent leur ultime examen médical. Les médecins découvrent une tache sur les poumons de Koubasov et diagnostiquent un début de tuberculose !. Le verdict tombe. Le 6 juin 1971 à 6 h 55, c’est l’équipage Dobrovolsky, Volkov et Patsayev qui s’élance vers Saliout 1. Cette fois, le rendez-vous et la jonction se déroulent parfaitement et l’équipage pénètre enfin dans la station. L’odeur n’est pas agréable et l’air doit être entièrement recyclé après réparation des ventilateurs. L’équipage s’installe dans le Soyouz pour la première nuit. Dés le lendemain, l’équipage prend en main la station et commence le long programme scientifique. Le première station orbitale de l’histoire est enfin active.
La journée à bord s’organise ainsi : 8 heures de travail, 2 pour les repas, 2 pour la gymnastique, 2 pour les soins personnels, 2 pour les loisirs et 8 pour le sommeil.
Après une semaine de vol, les cosmonautes adoptent un décalage dans leurs emploie du temps. Ainsi Dobrovolsky prend son petit déjeuner pendant que Volkov déjeune et que Patsayev dîne. Compte tenu de l’état des cosmonautes après le vol longue durée de Soyouz 9, les habitants de Saliout 1 s’astreignent à porter le costume pingouin pendant la journée. 3 fois par jour, ils font des exercices sur le tapis de course à pied en portant un costume baptisé Athlète et fond des séjours dans l’équipement Tchibis pour forcer le sang dans la partie basse du corps par pression négative.
Il serait trop long de décrire ici l’ensemble des 140 expériences réalisées à bord par l’équipage. Elles couvrent principalement 4 domaines :
Médicales afin d’étudier l’évolution de la physiologie de l’homme lors d’un vol de longue durée, Biologiques avec études sur des plantes et des insectes, Astrophysiques à l’aide du télescope UV Orion – 1 (que certains classeront comme équipement militaire chargé de détecter les missiles) et rayons Gamma avec le télescope Anna – 3, Géophysiques par photographies et études de la composition chimique de l’atmosphère.
Un incident survient le 16 juin. Une forte odeur de brûlé envahit la station. De la fumée provient d’un tableau de commande d’instruments scientifiques. Après quelques hésitations à abandonner Saliout, le Commandant Dobrovolsky décide d’isoler le tableau et de poursuivre la mission.
A partir du 26 juin, l’équipage prépare le Soyouz pour le retour et le charge des résultats d’expériences, films et enregistrements divers.
Pendant ces préparatifs, les cosmonautes ne peuvent observer le lancement de la troisième N1 qui explose 37 secondes après la mise en marche des moteurs. Le 28, après avoir décroché et rangé dans le Soyouz les portraits de Lénine, Korolev et Gagarine, l’équipage procède à la mise en veille de la station.
Le drame du retour
Le 29, l’équipage ferme les écoutilles et regagne le Soyouz. Volkov signale au sol que le voyant d’étanchéité entre la capsule et le compartiment orbital ne s’allume pas. Le sol lui conseille de reprendre la procédure et après avoir resserré le volant de l’écoutille (6 tours ½), le voyant atteste de la fermeture.
La pression du compartiment orbital est abaissée à 160 mm. Lors de l’orbite suivante, à 21h 25 (heure de Moscou), Soyouz 11 se détache et l’équipage commence à inspecter Saliout 1 et prendre des photographies. Les 3 cosmonautes disposent de deux révolutions pour préparer leur retour.
3 heures ½ plus tard (nous sommes déjà le 30 juin), le dernier échange avec le sol permet à l’équipage de connaître les conditions météo des deux sites de retour. Le sol en profite pour leur donner les dernières consignes, notamment de rester dans la capsule et attendre que l’équipe de médecin procède à l’ouverture de l’écoutille.
A 1 h 35, les moteurs sont mis à feu pendant 187 secondes pour décrocher de l’orbite. L’équipage ne confirme pas l’allumage. (Les donnés qui suivent proviennent en partie des enregistreurs de bord)
A 1 h 47, l’équipage ne signale pas le largage du compartiment orbital. Soyouz 11 est encore à 168 km d’altitude.
Volkov semble anxieux. Son pouls affiche 120 pulsations / minutes, Patsayev 106 et Dobrovolsky 85. La mise à feu des 12 boulons explosifs semble plus violente que prévue. Il semble que le choc provoque en 6/100ème de seconde, l’ouverture d’une valve de mise à l’air libre. L’air s’échappe ! La valve incriminée doit s’ouvrir automatiquement entre 2 et 3 000 mètres d’altitude afin de permettre à l’air frais d’envahir la cabine. Le système de contrôle d’attitude tente automatiquement de compenser la rotation de la capsule due à la fuite. Quelques secondes plus tard, conscients du problème par la mise en marche intempestive des tuyères du contrôle d’attitude et probablement par le sifflement de la fuite, le pouls de Dobrovolsky passe à 114 et celui de Volkov à 180.
Afin de mieux localiser la fuite située sous l’un des trois sièges et tenter de la refermer, l’équipage coupe la radio.
Les cosmonautes savent que cette valve est dure à refermer manuellement (27 secondes) dans l’unique cas ou le Soyouz amerrit.
L’enregistreur de la cabine constate que la pression chute de 915 à 50 mm de mercure en 115 secondes.
50 secondes après la séparation du compartiment orbital, le pouls de Patsaiev affiche 42 puls/mn, caractéristique d’un manque d’oxygène.
A 110 secondes, les cœurs des 3 hommes cessent de battre.
2 minutes après la séparation du compartiment orbital on peut considérer les trois hommes comme morts.
La capsule poursuit sa descente avec les trois cadavres à bord. On note une légère rotation de la capsule sur elle même pendant la rentrée, suite à la fuite de la valve qui avait entraîné la rotation.
A 2 h 05, un hélicoptère et un avion voient la capsule sous parachute. Soyouz 11 se pose à 2 h 18 en même temps que les 4 hélicoptères de l’équipe de récupération qui s’attend au pire. 2 minutes plus tard, l’écoutille est ouvert sur trois corps inertes. Les médecins se lancent dans une vaine tentative de réanimation, sans résultat.
L’autopsie révèlera des hémorragies dans le cerveau, du sang dans les poumons et de l’azote dans le sang confirmant la piste de la dépressurisation.
Malgré les tests répétés en chambre à vide à la Cité des étoiles, l’incident ne put être reproduit mais la piste de la valve défectueuse fut retenue.
Le 3 juillet, lors de funérailles nationales sur la place Rouge, les cendres des trois hommes furent placées dans le Mur du Kremlin.
4 années après Soyouz 1 et la mort de Komarov, les soviétiques vivaient un nouveau drame qui occultait le succès du séjour à bord de la première station orbitale de l’histoire. A titre posthume, l’équipage bat le record de séjour dans l’espace avec 23 jours et 22 minutes.
La mission Soyouz 12 prévue pour la mi-août avec Leonov, Koubasov et le militaire Kolodin est bien évidemment abandonnée. Leonov et Koubasov seront affectés à Apollo – Soyouz.
La mission de la station était prévue pour trois mois. En octobre, un problème électrique rendit difficile le contrôle d’attitude de Saliout 1 et l’ordre de désorbitation fut envoyé le 10 octobre 1971. Après 175 jours dans l’espace, Saliout 1 plonge dans l’atmosphère et ses restes dans le Pacifique.
Bibliographie
Les conditions de vol des missions liées à Saliout 1 ont toujours été difficiles à déchiffrer. Il fallut attendre la mission commune Apollo – Soyouz pour qu’à la demande des américains, les soviétiques lèvent une partie du voile. Ce n’est que depuis la publication des mémoires de Boris E Chertok, membre de l’équipe de Korolev depuis 1946 que nous connaissons mieux certaines circonstances de la mission.
Cosmos Encyclopédie – Albert Ducrocq – Editions Neuf
The Soviet Manned Space Programme – Ph. Clark – Salamander
L’astronautique Soviétique – Ch. Lardier –
The Soviet Cosmonaut Team Vol.1 – Gordon Hooper – FBIS
Divers écrits de Boris E. Chertok
Russian Space History - Sotheby’s – New-York Décembre 1993
Et les sites internet
Mark Wade’s Encyclopedia Astronautica
Capcomespace.net de Capdevila
Svengrahn.pp.se de Sven Grahm
Durée du vol raccourcie ?
Après la catastrophe de Soyouz 11, certains journaux avancèrent l’idée que l’état de fatigue des trois cosmonautes avait imposé un retour avancé d’une ou deux semaines. Plusieurs indices ont depuis confirmé que le retour était bien prévu pour le 30 juin. Parmi ces indices, voici l’un des plus étonnants.
La veille du décollage de Soyouz 11, Victor Patsayev pénètre dans la chambre de Gretchko à l’hôtel des cosmonautes de Baïkonour. Grechko n’est pas là. Sur son lit, une poupée. Patsayev décide de lui faire une surprise en lui faisant une dédicace au dos de la poupée. Comme il est de tradition de ne pas faire de dédicaces avant un vol, Patsayev antidate son message en indiquant la date du 1er juillet, date prévue pour son retour à l’hôtel, le lendemain de l’atterrissage.
Légende de la photo :
La poupée de Grechko dans la catalogue Sotheby’s.